Cinéma et Psychanalyse

Les Liaisons dangereuses[1] de S. Frears ouvrira notre cycle intitulé « Douleur d’aimer ». Ce film est une adaptation du roman éponyme épistolaire de P. C. de Laclos[2], cette adaptation ne peut respecter à la lettre la forme épistolaire du roman, par contre il y est encore bien question d’amour. 
J. Lacan nous a laissé des formules sur l’amour qui ne s’apprivoisent pas facilement mais qui questionnent assurément. En voici deux pour nous aiguillonner : « L’amour c’est donner ce qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas[3] » et « seul l’amour permet à la jouissance de condescendre au désir[4] ».
Quel intérêt y a-t-il à nous y référer ? L’amour et son pendant qu’est la haine font la trame des Liaisons dangereuses. Cinq personnages majeurs sont au cœur de cette intrigue. S’agissant d’intrigue, la Marquise de Merteuil est celle qui semble tirer toutes les ficelles. Elle n’a qu’une idée en tête : se venger. Rien ne la fera reculer. Elle n’engage pas son manque, elle commande mais elle est également commandée par sa jouissance, pour le pire. Elle considère l’autre comme une marionnette qu’elle doit manipuler, afin de se protéger. À commencer par le Vicomte de Valmont un de ses anciens amants, néanmoins ami, grand libertin qui se met en tête de conquérir la Présidente de Tourvel, une femme mariée qui se réfugie dans la bigoterie pour se défendre de l’amour, qu’elle craint, tout en espérant secrètement le rencontrer. Car, à l’exception de la Marquise de Merteuil, tous espèrent que grâce à l’amour ils pourront être heureux. Il est donc question d’être. Mais, il y a un pas à faire, un risque à prendre. Il faut en effet engager son être, son manque, céder une part de sa jouissance (vengeance, bigoterie, jouissance sexuelle, consentir à se laisser conquérir) et il faut que l’autre fasse de même. Le Chevalier Danceny et Cécile de Volanges montrent la voie. Comme dans la chanson Play the Game[5] (of love) les personnages sont invités à jouer le jeu, à parier sur l’amour et, par-dessus tout, à ne pas trahir leur désir. Comme dans toute partie, on peut gagner ou perdre et au jeu de l’amour, on le sait, on peut perdre gros. Si tel est le cas, peut-on s’en remettre ? Alors, question sous-jacente à notre thème « Douleur d’aimer », comment la psychanalyse agit-elle pour dépasser cette souffrance ?
Après la projection nous aurons le plaisir de discuter avec notre invitée Céline Poblome-Aulit, psychanalyste, membre de l’École de la Cause Freudienne. 
 
Grégory Leduc 
 
[1] Stephen Frears, Dangerous Laisons, Warner Bros. Entertainment, 1988.
[2] P. C. de Laclos, Les liaisons dangereuses, Durand-Neveu, 1782.
[3] Lacan J., Séminaire XIII, L’objet de la psychanalyse, inédit, séance du 17/03/75. 
[4] Lacan J., Le Séminaire, livre x, L’angoisse, Paris, Le Seuil, 2004, p. 209.
[5] Queen, Play the Game, The Game, EMI, 1980.
Cinéma et Psychanalyse